Les mémoires d’un pirate (037)

Et en effet, lui se reprit mieux que moi et me désarma avant de déchirer mon bas de pantalon. J’avais l’air malin maintenant…

– Tu peux pas te payer des pantalons plus longs ?
– J’ai gagné le concours des beaux mollets musclés…

Et je le lui confirmai en lui balançant un énorme shoot dans l’entrejambe. Maintenant on était quitte.

Mais alors qu’il se relevait péniblement, je réalisai qu’il possédait toujours un énorme avantage dans ce duel : il était, contrairement à moi depuis peu, armé. Et plutôt en rogne en plus. Je tournai la tête et aperçus mon épée au bord du ponton, prête à plonger à la mer. Je me jetai sur elle dans une glissade artistique impressionnante mais trop tard : elle venait de balancer du côté de l’eau, là où elle irait rouiller durant le restant de ses jours. J’avais un pépin semblait-il.

Goodnight s’approcha de moi sous le regard satisfait de Shinetop. Je pouvais me tromper mais ses intentions semblaient tout autres que pacifiques. Le corps de Larry fondait sur moi empêchant la faible lumière de la lune de venir jusqu’à moi. Il m’attrapa par le collet et me souleva du sol. Lorsque je baissais la tête, je me rendis compte que la terre ferme avait disparu. Il voulait m’envoyer rejoindre ma fidèle épée.

– Ce serait trop simple, avoua Goodnight exhibant ses plus beaux chicots.

Il me cala contre les spectateurs et brandit son arme vers ma joue.

– Je vais t’aider à te raser…

Je tournai la tête vers les autres pirates qui me regardaient avec une tête d’enterrement. Probablement le mien. Et c’est alors que je tentai ma dernière carte : m’emparant de la choppe de grog de l’un des spectateurs je lui balançais le liquide corrosif à la figure.

– Voilà mon après rasage ! lui dis-je en me libérant de sa solide étreinte.

Alors que Goodnight se soulageait comme il pouvait en criant, la lune donna l’impression de trembler sous l’écho ! Le grog rongeait la peau de ce pauvre bougre de Larry qui n’avait sûrement pas mérité un pareil sort. Je balançai mon poing dans son épée qui alla se perdre à son tour dans la mer. Maintenant le duel à l’épée (sans épée) serait uniquement verbal… c’est-à-dire : plus sanguinaire que jamais !

Goodnight,  même en titubant, parvint à me lancer une première attaque :
– Tu ne peux pas comparer ton esprit au mien, pauvre idiot !

La foule hua un gros « Ooooh ! ».

Je répliquai :
– Quand tu l’utiliseras tu me feras signe !

La foule fit « Aaaaaaah ! ».

Goodnight ne se découragea pas pour autant et me jeta cette fois sous les applaudissements du chaleureux public :
– J’ai parlé à des singes qui étaient plus polis que toi !
– Je vois que tu as passé du temps chez tes parents !

Le public n’en pouvait plus. Ils nous encouragèrent chacun notre tour ne sachant choisir leur combattant préféré. Smirk en profita pour ouvrir des paris qui furent immédiatement confisqués par le shérif Shinetop sous les « Booooooouuuh ! » du public.

– Jamais un gamin portant encore des couches ne battra le grand Larry Goodnight ! me lança-t-il en ultime assaut.

Ah non ! Voilà que lui aussi se mettait à parler de lui à la troisième personne ! Il était grand temps de l’achever :
– Que veux-tu, quand on est marin il faut savoir se mouiller !

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