Les mémoires d’un pirate (076)

– Mais je ne veux pas te faire peur, enchaîna-t-il. Je suis sûr qu’un grand type comme toi pourra faire face à ce monstre. Après tout, il est plus petit que la bête qui m’a mutilé dans mon enfance.

Oui, mais comme me le répète toujours et encore Elaine, « Ce n’est pas la taille qui
compte » (42).

Meethook composa nerveusement le code de sécurité et ouvrit tous les cadenas. Cela lui prit au moins dix minutes. Enfin, la grande porte métallique put s’ouvrir. Inutile de préciser que je n’étais plus si curieux de découvrir ce qui se trouvait à l’intérieur. Je pus constater avec soulagement qu’il n’y avait pour le moment, rien d’autre qu’une seconde porte, plus petite puisque d’à peu près ma taille, et en bois assez solide.

– J’espère que tu seras plus rapide que moi, me dit Meethook en tirant un levier.

La seconde porte nous révéla son contenu. Une autre porte en acier trempé. Elle ne faisait plus que la moitié de ma taille. On s’approchait des dimensions d’une photo… Je le savais, je le savais !

– Oh, t’as pas de chance. Comme par hasard, j’ai oublié de le nourrir cette semaine.

Quel idiot ! Il tira une corde au plafond qui ouvrit la nouvelle porte. Cette fois, elle n’en cachait pas une autre. Elle révélait une petite caisse en bois vermoulue, pas très solide. Plus de doute: c’était soit la photo, soit un caniche-piranha ! Difficile de savoir quelle était la pire des solutions.

– Je te laisse ouvrir la dernière porte toi-même, enchaîna le pirate crochu. Mais laisse-moi m’écarter un peu avant.

Il me tourna le dos. Je l’interpellai affolé.

– Tu as peur ? me demanda-t-il sadiquement.
– Non, mais je ne sais pas quoi faire !

Je vous dis que je n’avais pas peur. Bien sûr, j’avais perdu totalement ma curiosité mais je n’avais pas peur. Et bien que ce bruit de castagnettes provint de mes genoux, ce n’était pas dû à la frousse mais au froid. Il devait y avoir une porte ouverte quelque part et…

– Tu dois ouvrir cette petite porte, et si tu es assez courageux, touche la bête qui se trouve à l’intérieur.
– Oh, c’est tout ?

Arnold Meethook partit se planquer dans un coin bien sombre. Il voulut mettre ses mains à côté de la bouche pour amplifier sa voix et me crier quelque chose quand il réalisa qu’il n’avait plus de mains et qu’il ne pouvait par conséquent pas le faire. Mais j’entendis tout de même ses instructions. Elles étaient bien simples. Ouvrir et toucher. Dit comme ça, ça peu laisser rêveur, mais dans ce contexte, non. Et mon coeur qui me jouait encore la Marseillaise dans un rythme cette fois techno… Bigre, cette caisse ne me semblait pas si petite finalement. Et plus je la regardais, plus elle grossissait. Ma première intention fut de prendre mes jambes à mon cou, puis je me ressaisis de ce moment épouvantable en me calibrant sur la caisse.

– Je ne suis pas une poule mouillée !

J’ouvris la dernière porte.

– Horreurrrrrrrr !!! hurla Meethook d’une voix à glacer le sang.

Je l’avais fait ! Il ne pouvait en croire son oeil ! La bête était en face de moi, la même qui l’avait lacéré dans son enfance et l’avait laissé sans mains et avec un seul oeil. Tonnerre, je n’avais jamais vu un vert si aveuglant. Se tenait devant moi et l’air plutôt renfrogné, un oiseau exotique grimpeur de grande taille au plumage coloré, capable d’imiter des sons artificiels, de la famille des psittacidés. Autrement dit un superbe spécimen de perroquet, le meilleur ami du pirate ! Alors, c’était donc lui qui terrifiait tant notre gros costaud tout chauve ?

————————-

42. Tiens… Pourquoi dit-elle ça au fait ?

Laisser un commentaire