Les mémoires d’un pirate (071)

Un navire ? Ca ?

– Il vient d’un pays bien au nord d’ici comme je te l’ai dit, où la mer est impitoyable et les hommes sont des durs à cuire… Tu ne serais pas de là-bas par hasard ? Tu as l’air un peu nordique… c’est un bon investissement.
– Pour un truc pareil, je ne te donne pas plus que mon poulet en plastique.
– Celui avec une poulie au milieu ?
– Oui.
– Je suis content que ce bateau n’ait pas d’oreilles, mon ami. Parce qu’autrement, il te donnerait une claque !

Une claque avec les oreilles ?

– Bon, reprit-il pas découragé, si tu cherches une aubaine, suis-moi !

Nous marchâmes jusqu’au fin fond de son magasin. Nous dûmes traverser un marécage infesté d’animaux sauvages pour y parvenir. Heureusement qu’avec le palais du gouverneur, j’étais désormais blasé. Et puis quand on a affronté une meute de caniches-piranhas venimeux, on ne craint plus rien. Pourquoi ce bateau était-il si difficile d’accès ? Etait-il si beau que Stan le veuille garder pour lui ? Il ne payait pourtant pas de mine : ça ressemblait plus à une épave qu’à autre chose. Il était à moitié coulé ce rafiot ! Sa couleur bleu marine était par contre très jolie. Bah ! C’était Stan le connaisseur, s’il me le montrait c’était pour une bonne raison.

– Voilà le célèbre « Singe des Mers » ! me dit-il. Ce bateau est le seul à avoir fait la traversée de l’île aux singes et à revenir avec, hum, un équipage à bord. Enfin, un équipage un peu spécial, il est vrai : tu vois, les propriétaires de ce bateau étaient deux pirates aventureux. Comme beaucoup avant eux, ils partirent à la découverte du secret légendaire de l’île aux singes. Et, comme tous les autres, ils disparurent à jamais. Leur destin ? Un mystère. Mais le véritable mystère c’est la manière dont le bateau est revenu sur l’île de Mêlée sans un seul être humain à bord. C’était un équipage de singes qui l’a ramené, ils m’ont vendu le bateau et sont partis aux Bahamas avec l’argent de la vente !

C’était la même histoire que m’avait raconté le vendeur de Mêlée ! Divagation et commérage de commerçants !

– Il n’y a pas de chimpanzés aux Caraïbes ! le coupais-je incrédule.
– Ne m’interromps pas ! C’est une histoire fascinante !
– Pardon.
– Ce n’est pas grave. En tout cas, cette beauté m’appartient maintenant… jusqu’au jour où je pourrais m’en débarras… le vendre à un chanceux et fortuné client.
– Tu acceptes toujours les bons du marchand ?
– Hé ! Bien sûr ! Ton crédit est toujours bien reçu chez Stan ! Ca ne me concerne pas si tu as eu des problèmes de crédit auparavant… un divorce… une faillite… que tu sois un parieur invétéré… Ce n’est pas à moi de juger ! Si le marchand te fait confiance, tu dois bien être un homme honnête avec un bon salaire, n’est-ce pas ? Alors, tu annonces la couleur ? Je sais que tu le veux et je sais que tu sais que je veux te le vendre. Alors ?

C’est quand même bizarre, mais mes yeux avaient du mal à voir autre chose qu’un gros morceau de bois pourri qui flottait avec difficulté. Si ce truc avait des qualités, il les cachait vraiment très bien.

– Il vaut combien ? demandais-je à Stan.

Il se gratta le menton, puis m’indiqua son prix :
– Tu peux larguer les amarres dès aujourd’hui pour la modique somme de 10000 pièces de huit.

Hein ? Tant que ça ! Mais c’était le double de mon budget !

– Tu as l’air surpris ? C’est que ce navire à pleins d’options intéressantes…
– Comme quoi par exemple ?

Laisser un commentaire