Les mémoires d’un pirate (070)

– Pourquoi ? Toi aussi tu lui as prêté un livre de cuisine ?

Je poussai un long soupir.

– Mais pas du tout ! Moi j’ai des raisons bien plus pures que les tiennes !
– Vraiment ?

Je me tournai vers la lune et serrai le poing. Des violons semblèrent de nouveau me jouer
une sérénade :
– Je fais ça par… AMOUUUUR !

Carla baya aux corneilles puis me répondit :
– Depuis quand, l’amour est-il une chose pure ?

Les violons se mirent à jouer subitement faux… Il fallait reconnaître qu’elle n’avait pas tous les torts. Non ! Qu’osais-je penser ? L’amour peut aussi être pur ! Regardez Roméo et Juliette ! Ou bien Tristan et Iseult ? Sans oublier les inoubliables Starsky et Hutch !

– Je vais sans doute le regretter plus tard, mais bon… je viens avec toi. J’y serais bien allée seule mais je n’ai plus de bateau. Je l’ai vendu pour me payer un stage de coiffure.

Elle se tourna à son tour vers la lune et serra le poing. Les violons se remirent de nouveau à jouer juste.

– … car j’ai toujours rêvé de devenir coiffeuse professionnelle ! Je n’ai jamais voulu devenir une enfourcheuse de mâles en chaleur ! Mais il faut me comprendre ! Il fallait bien que je me défende à l’école ! Tous ces hommes qui me courraient après ! J’ai craqué et j’ai utilisé mes ciseaux pour tous les découper en rondelles ! J’en avais marre que ces pervers me reluquent de toutes parts.

Je cessais subitement de lui mater les fesses. Faites qu’elle ne m’ait pas vu !

– Et bien, justement, ajoutais-je discrètement. Ca tombe bien que tu en parles parce que…

Bonté divine ! Elle n’avait pas aimé faire ça, mais au bout du compte, elle avait accepté d’aller voir le marchand pour lui demander un crédit. Je ne sais pas comment elle s’y était prise mais elle était ressorti un quart d’heure, non, une demi-heure après, avec un bon de 5000 pièces de huit. Elle avait probablement dû pour l’obtenir, en discuter fermement et énergiquement car elle m’était revenue en sueur et toute décoiffée. En plus elle en avait profité pour prendre son pain. Tout le monde était content, sauf bien sûr le marchand. Cet imbécile venait de nous refiler de l’argent pour rien du tout ! Comme si on allait un jour le rembourser !

C’est un Stan aux anges qui vint m’accueillir. Son sourire éblouissait toujours autant et je constatai en soupirant que tous les bateaux n’avaient pas été vendus. Quelle chance ! Lui qui m’avait dit que ça partait comme des petits pains !

– Je suis content de te revoir ! s’exclama-t-il en gesticulant toujours autant ses membres.

Je savais que tu reviendrais ! Tout le monde revient toujours me voir ! Et tu sais pourquoi ?

Il me prit sous son épaule et me tourna vers sa marchandise.

– Regarde un peu ces bateaux. Viens par ici, regarde !

Oui. Je sais. C’était toujours les mêmes. Pas de quoi fouetter un singe. Si l’on exceptait Ik le Titan. Malheureusement, Stan me confia qu’il ne pouvait pas accepter le bon pour un modèle à toutes épreuves tel que celui-ci. Il me conseilla de l’oublier mais me promit quelque chose de pas trop cher mais de solide.

– La qualité à un prix raisonnable. C’est ma devise !

Il m’amena devant une chose horrible. Très à la mode d’après lui dans les pays scandinaves, il y a plusieurs siècles. En effet, c’était une véritable antiquité, tout petit, avec des boucliers sur les côtés. Un drakkar qu’il disait.

– Je vois bien que tu es un type qui n’aime pas les fantaisies et je sais que la qualité compte pour toi. Regarde un peu comment tu es habillé. De façon rustre, comme ce navire.

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